Manon JALABERTSoutenance de thèse
Le 18 déc. 2025

Madame Manon JALABERT
Candidate au Doctorat en Histoire du Droit,
Université de Pau et des Pays de l’Adour,
Soutiendra publiquement sa thèse intitulée :
“Le droit et les violences sexuelles faites aux femmes dans le sport de haut niveau en France des années 1968 à nos jours”
Sous la direction de Monsieur Renaud Carrier.
La soutenance aura lieu le :
18 décembre 2025 à 14h00
Lieu : Salle Chafedaud, Institut Claude Laugénie, Collège SSH, Campus de Pau, Université de Pau et des Pays de l’Adour,
Avenue du Doyen Poplawski, 64000 Pau
Composition du jury :
- M. Renaud Carrier, Professeur des Universités, Université de Pau et des Pays de l’Adour, Directeur de thèse
- M. Paul Dietschy, Professeur agrégé des Universités, Université de Franche-Comté, Co-encadrant de thèse
- Mme Sylvie Humbert, Professeur émérite, Université Catholique de Lille, Rapporteure
- M. Olivier Chovaux, Professeur des Universités, Université d’Artois, Rapporteur
- M. Thomas Bauer, Professeur des Universités, Université de Limoges, Examinateur
- Mme Catherine Fillon, Professeur des Universités, Université Jean Moulin – Lyon 3, Examinatrice
- Mme Guillemine Taupiac-Nouvel, Maître de Conférences HDR, Université de Pau et des Pays de l’Adour, Examinatrice
Résumé :
En France, les violences sexuelles dans le sport de haut niveau sont le reflet de problématiques sociétales plus larges, exacerbées par un environnement fortement dominé par la masculinité. Longtemps, les normes légales et les règles des instances sportives ont cherché à punir ces actes, mais aujourd’hui, elles s’efforcent également de prévenir et pacifier les situations de violence. Les dispositifs ont évolué : écoute des victimes, respect des procédures, sanctions, et suivi des agresseurs.
Cette évolution a été lente. Face aux violences sexuelles, une « loi du silence » a longtemps prévalu. Les premières affaires dans le sport dans les années 1970 et 1980 ont été ignorées, voire mal instruites. Le scandale impliquant l’athlète C. Moyon de Baecque au début des années 1990, bien qu’il ait suscité un relais médiatique, n’a donné lieu à aucune conséquence dans le monde du sport. À cette époque, bien que la législation sur le viol ait été adoptée en 1980, les instances sportives peinaient à reconnaître la portée des faits. Le sport, comme d’autres secteurs, se distinguait peu des pratiques judiciaires de l’époque.
Avec l’adoption du nouveau Code pénal en 1994 et l’introduction successive de lois plus complètes et précises, la parole des victimes commence à se libérer. Elles sont désormais au cœur du dispositif juridique. L’émergence de scandales dans d’autres secteurs de la société (Église, cinéma, médias), couplée à l’effet #MeToo, intensifie la pression sociale. Le sport de haut niveau n’échappe pas à cette dynamique. L’affaire Demongeot dans les années 2000 marque un premier tournant, suivi par une clarification des règles et des pratiques éthiques au sein des instances internationales du sport (CIO).
Cependant, le ministère des Sports a réagi lentement, et ce n’est qu’au milieu des années 2000, après une série de scandales au sein de la Fédération des Sports de Glace, que la prise de conscience a permis de prendre en compte l’ampleur du problème. Dans cette logique, le sport de haut niveau s’inscrit dans une dynamique similaire à d’autres institutions (l’Église, la famille), où dénoncer revient souvent à trahir. Malgré les affaires précédentes, ce n’est que face à la violence systémique et à sa visibilité croissante dans d’autres pans de la société que le sport a commencé à reconnaître ces violences. La loi du silence a ainsi été brisée.
Aujourd’hui, une nouvelle logique s’impose, fondée sur le droit général : écoute des victimes, nouvelle perception des violences, reconnaissance des faits, respect des règles et des procédures. Cependant, malgré ces évolutions, le sport continue de maintenir une relation complexe avec le droit. Enchevêtré dans un réseau de règlements internes et soumis à la pression de son propre écosystème, le sport développe souvent des pratiques qui s’écartent du droit commun. Les sportifs, en particulier les mineurs, ignorent souvent ces règles, ce qui favorise des comportements illégaux.
Cette thèse d’Histoire du Droit cherche à comprendre l’évolution du traitement des violences sexuelles par le droit général depuis la fin des années 1960, à travers l’exemple du sport de haut niveau. Bien que des réponses légales aient progressivement émergé, les violences sexuelles ont longtemps été difficiles à appréhender par les instances sportives. La victime était souvent écartée et rendue responsable de son sort, voire de la dégradation de l’image de son institution. Souvent, les victimes étaient silencieuses, dociles, ou même soumises à une violence ordinaire non questionnée. L’organisation structurelle et le droit particulier du monde sportif interrogent davantage encore les rapports entre le sport et la loi générale.
Aujourd’hui, le droit général s’impose pour sortir le sport de l’image d’une « zone de non-droit » et garantir la sécurité des sportifs de haut niveau. Ces défaillances concernent également l’État, qui a longtemps eu du mal à s’emparer de ces enjeux.